Dysphorie de genre

La dysphorie de genre

La dysphorie de genre est un sentiment très particulier. Je pense qu’il est quasiment impossible pour une personne cisgenre de se faire une idée de ce ressenti. Cet article a pour objectif de montrer l’ampleur de son impact à la fois sur la sensibilité, l’émotionnel et le mental des personnes transgenres.

De manière générale, les personnes cisgenres ont une position de rejet face à ce que vivent les personnes transgenres, ou alors l’acceptent mais ont ensuite tendance à ignorer la situation et faire « comme si de rien n’était », ce qui constitue malgré tout une forme de déni. Les causes sont diverses et sûrement que s’y mêlent de la peur, de l’incompréhension, ou simplement une absence d’intérêt.

La première chose à comprendre est que la dysphorie de genre est un « état d’âme » quasi permanent. Ce n’est pas un sentiment occasionnel que l’on peut balayer d’un revers de main ou une humeur passagère qui disparaît comme un nuage emporté par le vent.
J’ai utilisé le terme « quasi » car lors de certaines activités très absorbantes, le champ de conscience est bien-sûr détourné et focalisé sur un autre objet ; ou lors d’interactions sociales, notre « soi inférieur » est conditionné par l’entourage et joue en « mode automatique » le rôle associé au contexte (voir l’article « Les constituants de l’identité de genre »).
Ce que j’entends par permanent, c’est plutôt le fait que les jours et nuits où la dysphorie de genre ne se fait pas ressentir à un moment ou l’autre sont très rares.

Mais comment un sentiment peut-il être aussi omniprésent ? Pour pouvoir ne serait-ce qu’un peu le comprendre, le plus logique est d’aller explorer ce qui se cache derrière : il s’agit d’un désir non satisfait. Quoi de plus banal pour un être humain ? Oui, sauf que ce désir de « retrouver » sa vraie identité de genre et pouvoir totalement l’incarner surpasse de manière titanesque tous les souhaits plus ou moins ordinaires qui jalonnent nos vies.
Voici une comparaison intéressante pour tenter d’appréhender la puissance incommensurable de ce désir : pensez à votre état d’esprit et la véritable flamme qui vous habite lorsque vous êtes très profondément amoureux(se) ; cette joie, mais aussi ces manques, ces besoins, ces envies et impatiences… Et bien dites-vous que l’état d’âme et le désir d’une personne transgenre d’avoir un corps physique et un personnage social qui lui correspondent (et tout ce qui va avec) y ressemblent un peu, si ce n’est qu’ils sont peut-être dix fois plus forts et intenses…
Le terme « désir » ne suffit d’ailleurs pas pour l’exprimer mais la langue française ne semble pas disposer de mot vraiment approprié.

À un niveau personnel, lorsque j’ai vécu la levée de mon refoulement et que j’ai réalisé ma véritable nature (transgenre), l’expérience et le ressenti ont révélé un élément qui à mon sens est primordial : ce qui est sorti du plus profond de mon cœur et mon âme n’a pas été une pensée telle que « je veux être une femme » mais bel et bien « je SUIS une femme ».
Je crois pouvoir ainsi affirmer que les femmes transgenres (*) ne souhaitent pas « devenir » des femmes. Elles le sont déjà, au-delà de leur incarnation masculine. Ce qu’elles désirent, c’est pouvoir être QUI elles sont, vibrer et rayonner ce qu’elles sont, et donc s’épanouir en tant que femmes. Or cela n’est évidemment pas possible au vu de l’enveloppe corporelle qui leur a été donnée à leur naissance…

Comment vivre naturellement dans la fluidité et l’harmonie lorsqu’il y a une absence manifeste de correspondance avec le genre de notre corps physique ? Qu’à l’inverse il y a une complète et totale affinité avec l’autre genre ? Et qu’une incarnation adéquate dans un corps « femelle » aurait été tellement plus cohérente, comme une extension matérielle légitime de l’être que nous sommes réellement, au-delà de ces expériences terrestres ?
Comment s’affirmer et se faire reconnaître dans la société en tant que femme alors que notre corps masculin nous détermine logiquement en tant qu’homme, d’un point de vue physique, biologique et donc social ?
Sommes-nous condamnées à accepter de jouer ce rôle qui ne nous correspond pas ? Ou devons-nous envisager de nous lancer dans l’une de ces fameuses « transitions » de genre qui sont de plus en plus banalisées à notre époque ? Ces transitions de genre qui au-delà de tout ce qu’elles impliquent ne restent que partielles, puisqu’elles ne modifient pas le code génétique d’un individu et ne sont pas en mesure d’apporter certains attributs féminins fondamentaux comme l’utérus, cette magnifique matrice divine de création.

Je vous laisse dès lors imaginer toute cette diversité de sentiments, émotions, désirs ou frustrations spécifiques à l’expérience de vie transgenre qui composent ainsi ce que nous pouvons appeler la « dysphorie de genre ».

(* il y a évidemment une équivalence pour les hommes transgenres)

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